Comment les collectivités peuvent-elles réduire la facture de l’éclairage public ?
Véritable enjeu de dépenses publiques, l’éclairage public représente en moyenne 41 % des consommations d’électricité des collectivités territoriales, selon l’ADEME. En cause, l’obsolescence d’une grande partie du parc de candélabres et le fait que certains surconsomment particulièrement. A ce titre, des solutions comme le renouvellement des installations anciennes (installation de LED) ou le pilotage intelligent de l’éclairage public sont des leviers de réduction de la facture publique.
Contexte réglementaire autour de l’éclairage public
L’éclairage public se transforme en une source de pollution lorsqu’il n’est pas contrôlé. Si pour les usagers, il empêche d’admirer les étoiles, pour la collectivité, il devient vite un poids dans le budget en raison d’un gaspillage énergétique important. Mais là où le bât blesse, c’est lorsqu’il perturbe la biodiversité. Pour toutes ces raisons, le législateur est intervenu avec la loi portant engagement national pour l’environnement (Grenelle II) et a gravé dans le marbre – ou plutôt dans le code de l’environnement – une série de règles relatives à la régulation des nuisances lumineuses. L’une de ces mesures érige le maire de la commune et le préfet pour l’éclairage des bâtiments communaux, en tant que responsables du respect de ces dispositions.
Dans un arrêté du 25 janvier 2013, portant sur l’éclairage nocturne des bâtiments non résidentiels, le législateur fixait déjà des plages horaires à respecter pour l’extinction nocturne des lumières. Les lumières des vitrines et des commerces ainsi que les éclairages des façades des bâtiments devaient être éteints à 1 h du matin et celles des bureaux (en intérieur) 1 h après la fin de l’activité. L’arrêté du 27 décembre 2018 relatif à la prévention, à la réduction et à la limitation des nuisances lumineuses complète les mesures en vigueur en ajoutant des prescriptions techniques et de temporalité.
Éclairage public : les prescriptions de temporalité
- Les lumières éclairant le patrimoine et les parcs et jardins accessibles au public doivent être éteintes au plus tard à 1h du matin ou 1h après la fermeture du site.
- Les parkings desservant un lieu ou une zone d’activité doivent être éteints 2h après la fin de l’activité, contre 1h pour les éclairages de chantiers en extérieur
Éclairage public : les prescriptions techniques
L’arrêté précise également des normes techniques qui doivent être respectées en agglomération et hors agglomération :
- Voirie sauf tunnel et sécurité liés à une activité économique et situés dans un espace clos non couvert ou semi-couvert : 35 lumens (lm)/m² en agglomération et 25 lm/m² hors agglomération
- Les parcs et jardins : 25 lm/m² en agglomération et 10 lm/m² hors agglomération
- L’éclairage intérieur émis vers l’extérieur des bâtiments non résidentiels : 25 lm/m² en agglomération et 20 lm/m² hors agglomération
- Les parcs de stationnement non couverts ou semi-couverts : 25 lm/m² en agglomération et 20 lm/m² hors agglomération
À noter que les préfets peuvent prendre des dispositions plus restrictives en fonction de la faune et la flore présentes sur leur territoire ou de la continuité de leur politique écologique.
Depuis le 1er janvier 2020, les luminaires installés doivent être conformes à l’ensemble des dispositions, ce qui interdit désormais les canons à lumière de plus de 100 000 lumens et les installations à faisceaux de rayonnement laser. En outre, les responsables de parcs de candélabres doivent être en mesure de vérifier la conformité des installations d’éclairage (données sur l’intensité lumineuse, date de mise en fonction ou encore puissance électrique).
Collectivités : quelles solutions pour réduire la facture d’éclairage public ?
1. Faire un bilan de l’éclairage public
Cela peut paraître simpliste mais la première chose à faire pour réduire la facture d’éclairage public est de dresser un bilan des installations de la commune.
L’ADEME a mis en ligne son outil de pré-diagnostic en éclairage public (OPEPA), outil de décision destiné aux élus des collectivités et aux services techniques. Il leur fournit une comparaison entre le matériel d’éclairage de la collectivité et celui par lequel elle pourrait le remplacer. Pour cela, le responsable de l’éclairage public saisit les données de sa commune sur OPEPA qui fait ensuite des estimations sur les économies financières et énergétiques possibles selon différents scenarii de rénovation.
L’ADEME propose également un cahier des charges de diagnostic pour leur parc d’éclairage public qui contient des objectifs dont :
La réalisation d’un état des lieux opérationnel afin de :
- Contribuer à améliorer la connaissance des élus
- Réaliser un inventaire de l’existant (technique, sécuritaire, énergétique)
- Tracer des voies pour améliorer la maintenance de l’installation
La réduction des consommations d’énergie et des émissions de gaz à effet de serre afin de :
- Réduire le coût global de l’installation
- Réduire les consommations d’énergie
- Améliorer la qualité de l’éclairage, son service rendu à la ville et aux usagers
- Réduire les nuisances environnementales liées à la lumière
2. Passer aux luminaires LED
Les particuliers ont compris depuis longtemps que les ampoules LED étaient bien moins énergivores que leurs homologues halogènes. C’est pourquoi les collectivités privilégient de plus en plus les luminaires LED pour réduire leur consommation d’énergie. La métropole dijonnaise a, par exemple, remplacé en 2019 les 34 000 points lumineux de son éclairage public en « 100 % LED ». De quoi permettre de réaliser 65 % d’économies annoncées sur ce poste de dépense.
Une telle économie peut être atteinte grâce à une spécificité des dernières générations de LED : les luminaires LED permettent de moduler l’éclairage et surtout ils consomment 50 % d’électricité de moins que les luminaires équipés de lampes à décharge. Les communes peuvent ainsi programmer une réduction de l’intensité lumineuse à certaines heures de la nuit dans certains quartiers. Une innovation qui leur permet, en outre, d’agir en faveur de la biodiversité, en diminuant la pollution lumineuse nocturne néfaste à la faune. Les LED offrent de multiples avantages comme une grande résistance aux intempéries, une durée de vie rallongée et un recyclage facilité. Enfin, elles permettent d’y connecter des systèmes de détection de présence.
3. Réduire la facture d’éclairage public grâce au smart lighting
Le smart lighting comprend toutes les technologies (caméra, capteur, photocellules) autour de l’éclairage public qui permettent un pilotage automatisé.
Le premier niveau de smart lighting tient d’abord de l’utilisation de l’éclairage au bon moment et non plus tout le temps et partout. Le pilotage à l’armoire par exemple, permet de contrôler l’allumage de tous les candélabres de la ville grâce à une horloge astronomique qui suit les rythmes des saisons pour proposer des commutations adaptées chaque jour de l’année. Soit le responsable technique choisit ces heures d’allumage automatisées, soit il peut décider de reprendre la main lorsque c’est nécessaire (événements nationaux, fête de la musique). A noter qu’il existe des systèmes plus poussés, dits de pilotage au point lumineux qui permettent de piloter individuellement chaque candélabre ou même de réagir selon la présence d’usagers (capteurs avec détection) et de communiquer entre eux.
Ainsi, à l’aide d’une application, les usagers pourraient envoyer une demande à l’armoire de pilotage pour éclairer l’endroit où ils se trouvent grâce à la géolocalisation. Rendue possible par le smart lighting, ce type de solution répond au besoin de sécurité des habitants le soir.
Un autre exemple d’innovation visant à réduire le coût de l’éclairage public est celui d’une société bordelaise, OliKrom, dont la peinture photoluminescente capte la lumière du soleil et des phares de voiture, pour la restituer la nuit. L’expérimentation se poursuit en Gironde et a déjà fait ses preuves dans la commune de Pessac. La solution a vocation à se substituer à l’éclairage public.
Solution pertinente et efficiente pour réduire la facture d’électricité, le smart lighting comporte de nombreux avantages. C’est par exemple un bon moyen de protéger la biodiversité en créant des des corridors écologiques caractérisés par une certaine obscurité et empruntés par les espèces nocturnes. Ces corridors sont appelés « trames noires ». Cette notion de trame noire rejoint le concept de réservoirs et de corridors écologiques, ensemble appelé trame verte et bleue en France. Cette dernière, dont la définition est issue du Grenelle de l’environnement en 2007, a été largement incluse dans les Schémas Régionaux de Cohérence Écologique (SRCE).
Sur le volet sécurité de l’espace public, le pilotage intelligent des candélabres peut être utilisé en cas de descente de police la nuit. En effet, les centres de sécurité urbaine auront généralement la main sur la console de l’éclairage, afin d’éclairer les zones en cours d’intervention.
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