Coupures de nuit : une nécessité pour faire des économies d’éclairage public ?
« L’éclairage public est le deuxième poste de consommation d’énergie des communes après les bâtiments, avec 12% des consommations et 18% des coûts d’énergie. Cela représente 31% des dépenses d’électricité », rappelait le gouvernement français dans son plan de sobriété énergétique de début 2022.
L’éclairage public est soumis de nos jours à des injonctions contradictoires. D’un côté, les usagers de la voirie, qui souhaitent se sentir en sécurité en tout lieu et à toute heure et préfèrent un éclairage public permanent et omniprésent. De l’autre, les défenseurs de l’environnement, qui rappellent la nécessité de préserver des corridors écologiques pour la faune, et les tenants d’une gestion publiques raisonnée qui connaissent l’importance de ce poste de dépense dans le budget des communes.
L’effort de sobriété demandé à l’échelle nationale pour réduire les risques sur le système électrique a conduit certaines collectivités à sauter le pas. On retrouve certains quartiers de Metz, Trouville-sur-Mer, Saint-Brieuc, et 240 communes de la Vienne. Autant de secteurs et de communes qui ne seront plus éclairés la nuit pour tenter de réaliser des économies d’énergie.
Les coupures d’éclairage public nocturne : quelle réglementation ?
L’éclairage général et absolu de l’ensemble des voies des collectivités territoriales n’est soumis à aucune disposition législative ou réglementaire. Il s’agit d’un moyen utilisé pour assurer le maintien de l’ordre public sur la commune.
A ce titre, l’éclairage public relève en premier lieu de l’autorité décisionnelle du maire et de ses pouvoirs de police. En second lieu, la collectivité territoriale doit assurer l’entretien matériel de l’ouvrage public que sont les lampadaires ou candélabres.
Les collectivités peuvent donc s’appuyer sur des considérations environnementales et économiques, conjuguées à des obligations normatives, pour réduire ou supprimer l’éclairage artificiel. Cependant, cette décision doit faire l’objet d’une analyse précise et de certaines précautions afin d’éviter tout risque d’engagement de responsabilité.
Quelles sont les motivations autour des coupures de nuit ?
Les considérations environnementales : un cadre national strict
La réduction des émissions de gaz à effet de serre, la baisse de la consommation d’énergie, la lutte contre le changement climatiques constituent autant de motifs justifiant une réduction ou une coupure de l’éclairage public nocturne. La loi « Grenelle 2 » a favorisé la lutte contre la pollution lumineuse, complétée par des lois ultérieures en matière d’exigences de résultats. En particulier, l’arrêté du 27 décembre 2018 fixe des conditions strictes pour la protection de la biodiversité et la réduction des consommations d’énergie. Il impose notamment l’extinction des lumières éclairant le patrimoine, les parcs et jardins ou encore les parkings.
Les considérations économiques : une piste intéressante d’optimisation budgétaire pour les collectivités
Certaines collectivités envisagent les coupures d’éclairage comme une option intéressante pour faire diminuer le montant de la facture énergétique. L’association éco-maires estime ainsi que l’éclairage public pèse pour un tiers du budget électricité des collectivités.
En Côte-d’Or, de nombreuses communes ont fait ce choix, à travers la pose d’horloges astronomiques, qui permettent d’allumer et d’éteindre l’éclairage en fonction des horaires de coucher et de lever du soleil, ainsi que de baisser l’intensité de l’éclairage. En moyenne, des coupures nocturnes ont fait économiser près de 50% aux collectivités sur 1 an en fonction du type de contrat de fourniture.
De son côté, le département de la Nièvre a réalisé 70% d’économies d’énergie en éteignant de 22h à 06h.
Coupures de nuit et sécurité : comment concilier les deux ?
Les résultats obtenus en matière d’économies budgétaires et énergétiques permises par les coupures sont donc sans appel, sans compter les autres bénéfices comme la possibilité d’observation du ciel ou la limitation des regroupements provoquant des troubles à l’ordre public.
Cependant, certains arguments conduisent certains citoyens à s’opposer à la baisse de l’éclairage public. Le sentiment d’insécurité qui pourrait résulter des coupures constitue parfois un obstacle à la prise de décision.
2 idées reçues sur les coupures nocturnes
1. Les coupures de nuit augmentent l’insécurité routière.
Dès lors que la signalisation routière et les aménagements sont conformes à la réglementation, l’extinction nocturne n’augmente pas le nombre d’accidents. Au contraire, la baisse de luminosité inviterait plutôt les automobilistes à réduire leur vitesse.
2. Les coupures de nuits conduisent à une recrudescence des délits
De manière contre-intuitive, les effractions ont lieu principalement en journée ; les communes ayant mis en place un dispositif de coupure nocturne n’ont par ailleurs pas noté une augmentation significative des délits.
LED et Smart lighting : des alternatives crédibles aux coupures d’éclairage public
Il est indéniable que la ville de demain devra relever le défi de la transition énergétique tout en garantissant le confort de ses habitants.
Le smart lighting – éclairage intelligent – ouvre par ailleurs de nouvelles perspectives. Rendu possible grâce au développement des luminaires LED, il s’agit d’un système d’éclairage public qui intègre des technologies telles que des caméras, des photocellules et des capteurs IoT pour permettre un monitoring automatisé.
Les luminaires sont connectés et permettent un pilotage à distance. Pour les collectivités qui ne souhaitent pas éteindre, il est ainsi possible de programmer des variations de l’intensité lumineuse en fonction des besoins et des usages.
A minima, il est donc primordial de moderniser les installations lumineuses. Beaucoup d’installations encore en service ne sont plus adaptées et sont beaucoup trop énergivores : 40% des luminaires en service ont plus de 25 ans, et moins de 20% de l’éclairage public a été rénové en technologie LED en 2022.
Dans la Nièvre, 6 000 LED sur 60 000 points lumineux ont ainsi été installées. Cela permet d’obtenir le même éclairage avec moins de puissance installée.
Installés sur les candélabres ou directement sur les luminaires, les capteurs de mouvements peuvent détecter un piéton ou un véhicule et déclencher l’éclairage, jusqu’à ce que le mouvement s’estompe. A l’inverse, le système permet de baisser l’intensité lumineuse dans un endroit non fréquenté.
Pour concilier au mieux les enjeux de biodiversité, de sécurité et d’économies d’énergie, une gestion différenciée de l’éclairage est nécessaire. Pour cela, une stratégie d’adaptation de l’orientation, de la fréquence, de la durée et de l’intensité de l’éclairage est nécessaire ; stratégie dont les équipements connectés peuvent faciliter l’élaboration.
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