La mutualisation de la vidéoprotection entre les collectivités
Investir dans un dispositif de vidéoprotection opérationnel et performant peut se révéler inaccessible pour une collectivité aux capacités financières limitées. A ce titre, la mutualisation présente de nombreux avantages. Par la loi du 25 mai 2021 pour une sécurité globale préservant les libertés, les possibilités de mutualisation entre les collectivités territoriales en matière d’installation et d’entretien ont été assouplies. Tour d’horizon.
Mutualisation des caméras de protection : que dit la loi ?
Loi pour une sécurité globale : un premier pas vers la mutualisation des dispositifs de vidéoprotection
L’article 42 de la loi du 25 mai 2021 renouvelle le cadre législatif en matière de vidéoprotection[1].
- Les services habilités au visionnage des images de vidéoprotection sont élargis aux services de polices municipales.
- Les communes équipées de caméras de vidéoprotection, rurales comme urbaines peuvent désormais être reliées au centre de supervision départemental[2] (CSU).
- Les mutualisations d’équipements de vidéoprotection entre communes peuvent s’effectuer dans un cadre plus large que celui des seuls EPCI à fiscalité propre.
Les apports de l’instruction du 4 mars 2022 : des précisions utiles pour assouplir les mutualisations
Cette circulaire du ministère de l’Intérieur rappelle le cadre d’utilisation des dispositifs de vidéoprotection et de leur mise en œuvre, avec un focus sur les structures de mutualisation qui peuvent regrouper des collectivités hétérogènes.
A quel cas précis l’enregistrement d’images se limite-t-il ?
- Protéger les bâtiments publics et leurs abords
- Réguler les flux de transport
- Constater les infractions aux règles de la circulation
- Assurer la sécurité des personnes et des biens dans des lieux sensibles (vol, trafic, fraudes douanières…)
- Prévenir les actes de terrorisme
- Anticiper les risques d’incendies, naturels ou technologiques
- Prévenir et constater les dépôts sauvages d’ordures et d’encombrants
Qui peut procéder à de tels enregistrements ?
Quatre types d’agents sont habilités à visionner des images de vidéosurveillance :
- Les policiers municipaux,
- Les agents territoriaux des communes et des EPCI à fiscalité propre qui n’appartiennent pas aux cadres d’emplois de la police municipale,
- Les agents des syndicats mixtes de mutualisation,
- Le maire, en tant qu’autorité de police municipale, officier de police judiciaire et autorité fonctionnelle sur les agents de visionnage.
Quelles conventions conclure ?
L’instruction du 4 mars 2022 détaille les modalités d’organisation et de financement de ces dispositifs. Deux conventions doivent obligatoirement être conclues.
- L’une entre « la structure de mutualisation (EPCI à fiscalité propre ou syndicat mixte) et chacun des membres concernés », qui prévoit les modalités de financement du dispositif ;
- La seconde « entre la structure de mutualisation et les services de l’État » pour fixer les règles de transmission des images entre structure de mutualisation et les forces de sécurité nationales.
Quelles indications sur la gouvernance de la mutualisation apporte l’instruction du 4 mars 2022
La loi Sécurité globale offre la possibilité de réaliser des mutualisations dans un périmètre plus large que celui des seuls EPCI à fiscalité propre. Elles peuvent être mises en œuvre :
- Au sein des syndicats mixtes fermés (communes et EPCI exerçant la compétence relative aux dispositifs locaux de prévention de la délinquance – DLPD)
- Au sein des syndicats mixtes ouverts, avec, en plus, « un ou deux conseils départementaux aux territoires limitrophes ».
Dans le cas d’un syndicat mixte ouvert comprenant au moins un département, le dispositif ne peut être mis en œuvre que si la présidence du syndicat est exercée par le maire ou un président d’EPCI.
L’instruction rappelle également que les départements peuvent aussi appliquer un dispositif de vidéoprotection, mais exclusivement lorsqu’il s’agit de protection de bâtiments publics relevant de leurs compétences (collèges, réseau routier départemental, bâtiments administratifs).
Pourquoi procéder à la mutualisation des dispositifs de vidéosurveillance entre communes ?
La gouvernance de la mutualisation des équipements de vidéoprotection peut être mise en œuvre selon différents schémas, dont la souplesse a été renforcée par la loi Sécurité globale. Le cadre législatif précisé, il convient de rappeler les avantages de la mutualisation :
- L’augmentation des capacités d’investissement pour du matériel plus performant : l’acquisition du matériel, le visionnage « H24 » des images captées sont coûteux. La gestion du dispositif relève également d’enjeux pénaux et de sécurité qui nécessitent une forte montée en compétences, que les communes seules ne sont pas toujours à même d’assurer.
- La mutualisation des charges de personnel : le visionnage des images requiert une formation initiale et continue importante ainsi qu’un nombre d’opérateurs conséquent pour obtenir des résultats tangibles en matière de sécurité.
La mutualisation permet de monter en puissance en matière d’outils numériques pour renforcer le continuum de sécurité, par exemple avec un CSU. Celui-ci est une salle équipée d’écrans affichant en direct les images filmées par des caméras de vidéoprotection, qui peuvent parfois être manipulées à distance.
Lancé début 2019, le CSU intelligent et interconnecté du département des Yvelines permet de centraliser les images de collèges, d’une caserne de pompiers et d’un bâtiment départemental. Des caméras innovantes de très haute définition détectent de jour comme de nuit le passage de personnes. Ainsi, les agents regroupés dans ce centre de surveillance sont la plupart du temps face à des écrans noirs, qui ne s’allument que lorsque les algorithmes détectent une situation anormale dans l’un des lieux surveillés.
Le département des Yvelines s’est appuyé sur cet équipement existant et sur les évolutions législatives pour lancer le syndicat mixte Seine-Yvelines Numérique dès 2021. Une première tranche pilote a été lancée en 2022 avec une dizaine de communes rurales d’un EPCI du département jusqu’alors non équipées. Des discussions ont également été lancées avec des villes plus importantes, comme celle de Guyancourt.
En dépit de sa complexité apparente, la loi du 25 mai 2021 assouplit le cadre de la gouvernance pour la mutualisation des équipements de vidéoprotection. La montée en puissance conjuguée au coût d’outils plus performants reposant sur l’intelligence artificielle devrait encourager les collectivités territoriales à aller dans ce sens.
[1] https://www.vie-publique.fr/loi/277157-loi-pour-une-securite-globale-preservant-les-libertes
[2] Articles L.132-14 et L.132-14-1 du Code de sécurité intérieure
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